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21st Jun 1815

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Source: Archives de l’Assemblée nationale

1P27 : ouverture des négociations de paix : lettre signée de l’Empereur au président de la Chambre des représentants (21 juin 1815), 2 p. ms., r°/v°

The Opening of Peace Negotiations: Napoleon’s Letter to Lanjuinais

Contributed by: Y.-A. Durelle-Marc

This letter to the President of the Chamber of Representatives represents one of the stages in the 2nd downfall of the Emperor and in Napoleon’s coming to terms with his situation after Waterloo (or the Battle of Mont-Saint-Jean as Napoleon refers to it).

He avoids the word ‘defeat’ and still presents himself - as did the Revolutionary generals of 1792 and 1793 - as defender of the ‘patrie’. But the Revolutionary overtones mingle with imperialism in the letter because Napoleon calls on the Chamber to remain attached to his person. Napoleon’s recourse to two different sources of legitimacy is striking, as is his repeated enumeration of his ministers, which indicates the importance of the Chamber in deciding what will happen next. The letter also reveals that Napoleon stands denuded before the Chamber – he has neither material nor symbolic resources at his disposal. Even the genius and energy that since the Italian campaigns of the 1790s had become synonymous with him have now gone.

The letter was addressed to a Chamber unlikely to rally to Napoleon’s cause because it had elected as President a well-known opponent of Bonapartist autocracy, J.D. Lanjuinais (see the entry for 4 June) who had informed Joseph Bonaparte of the Chamber’s hostility the day before (see J.-P. Bertaud, L’Abdication. 21-23 juin 1815, Paris, Flammarion, 2011, p. 27). This perhaps accounts for the Emperor’s decision to send to the Chamber the most important of his most loyal supporters (or supposed loyal – for Fouché is serving other interests). The inclusion of Lucien Bonaparte to represent the Emperor, however, rather inconveniently made the Chamber less well-disposed towards Napoleon as his brother’s presence served as a reminder of the coup d’état of Brumaire (9 November 1799).

In fact it was the Chamber which took the initiative, reclaiming sovereignty in the name of the people and thereby separating the future of France from that of Napoleon. The representative Jay made it clear to Lucien that the Emperor’s abdication was needed without delay or the country would run the risk of being ruined.

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Transcription

[21 juin 1815]

Monsieur le Président [Lanjuinais],

After the battles of Ligny [16 June] et Mont St-Jean [Mont-Saint-Jean i.e. Waterloo, 18 June], and after having rallied the army at Avesnes and Philippeville, seen to the defence of the frontier and that of the towns of Laon and Soissons, I have returned to Paris to plan with my ministers the measures needed for the defence of the nation and to reach agreement with the Chambers on all that the salvation of the country requires.

I have formed a committee made up of the minister of foreign affairs [Caulaincourt], the comte Carnot [Minister of the Interior] and the duc d’Otrante [Fouché, Police] to renew and follow negotiations with the foreign powers in order to learn of their true intentions and to put an end to the war if that can be done in a way that is compatible with the independence and honour of the Nation. But we must be show an entirely united front and I count on the cooperation and the patriotism of the Chambers and on their attachment to my person.

I am sending to the Chamber as commissioners, Prince Lucien [Bonaparte] and the ministers of Foreign Affairs [Caulaincourt], of War [Davout], of the Interior [Carnot] and of the Police [Fouché] to bring this message and to provide any report or information that the Chamber may desire.

The Elysée Palace, 21 June 1815
Napoléon

« [mentions en surcharge : « N°49 », « 30 », « IV2 », tampon des Archives de l’Assemblée nationale et des Archives de la Chambre des Députés, date]
[21 juin 1815]

Monsieur le Président [Lanjuinais],
Après les batailles de Ligny [16 juin] et de mont St-Jean [Mont-Saint-Jean, i.e. Waterloo, 18 juin], et après avoir pourvu au ralliement de l’armée à Avesnes et à Philippeville, à la défense des places frontières et à celles des villes de Laon et de Soissons, je me suis rendu à Paris pour concerter avec mes ministres les mesures de la défense nationale, et m’entendre avec les Chambres sur tout ce qu’exige le Salut de la patrie.

J’ai formé un comité du ministre des affaires étrangères [Caulaincourt], du comte de Carnot [Intérieur] et du duc d’Otrante [Fouché, Police générale] pour renouveler et suivre des négociations avec les puissances étrangères, afin de connaître leurs véritables intentions, et de mettre un terme à la guerre si cela est compatible avec l’indépendance et l’honneur de la Nation. Mais la plus grande union est [p. 2] nécessaire, et je compte sur la coopération et le patriotisme des Chambres, et sur leur attachement à ma personne.

J’envoie au milieu de la Chambre, comme commissaires, le Prince Lucien [Bonaparte] et les ministres des affaires étrangères [Caulaincourt], de la guerre [Davout], de l’Intérieur [Carnot] et de la Police générale [Fouché], pour porter le présent message, et donner les communications et les renseignemens que la Chambre pourra désirer.

Au Palais de l’Élysée, le 21 juin 1815.
Napoléon »

Notice
Cette lettre au président de la Chambre des Représentants témoigne de l’une des phases successives de la seconde chute de l’Aigle et des étapes de sa prise de conscience de la situation. Napoléon s’y présente encore comme le rempart de la nation et son stratège, évitant d’écrire le mot « défaite », précisant qu’il est encore actif sur le front, à l’instar des généraux révolutionnaires de 1792 et 1793, rendant compte à l’Assemblée de leur situation et de leurs actes, et en appelant comme eux au « Salut de la patrie », à la « défense nationale ». Mais les accents révolutionnaires voisinent encore le césarisme lorsqu’il en appelle à « la coopération et [au] patriotisme des Chambres, et [à] leur attachement à [sa] personne ». La dualité des registres de légitimité auxquels recourt l’Empereur est ici frappante, de même que la double énumération de ses ministres, qui indique à la Chambre le crédit que Napoléon lui accorde et le caractère décisif du parti qu’elle prendra. Cette lettre n’en démontre pas moins combien l’Empereur est nu, désormais, ne disposant plus des ressources matérielles ni symboliques propres – le génie et l’énergie napoléonien – qui ont été, depuis la Campagne d’Italie, son mystérieux moteur et en fait le modèle par excellence de l’Idéal-Type césariste wébérien.

La lettre du 21 juin est cependant adressée à une Chambre peu susceptible d’adhérer à la cause de Napoléon, car elle a élu à sa Présidence un opposant notoire à l’autocratie bonapartiste, J.-D. Lanjuinais. Cette quasi hostilité, dont Lanjuinais a informé Joseph Bonaparte, (le 20 juin, voir .-P. Bertaud, L’Abdication. 21-23 juin 1815, Paris, Flammarion, 2011, p. 27) explique sans doute pourquoi l’Empereur envoie aux Représentants et en groupe les plus importants de ses hommes-liges (ou supposés tels, puisque le jeu d’un Fouché, par exemple, sert d’autres intérêts). L’envoi des ministres (Guerre, Relations extérieures, Police et Intérieur) à la Chambre répond – se soumet ? – à la résolution décidée par celle-ci sur proposition de Lafayette (art. 5, Résolution du 21 juin, Moniteur universel du 22 juin 1815, n°173, p. 711-712, art . 5 ; cité par J.-P. Bertaux, idem, p. 117) à la mi-journée. Lucien accompagne les ministres pour représenter l’Empereur. Mais le choix particulier de Lucien pour paraître dans la Chambre en son nom présente l’inconvénient de rappeler la séance de Saint-Cloud, du 19 brumaire an VIII (9 novembre 1799), dont il fut l’un des artisans principaux, ce qui ne peut qu’indisposer les Représentants et s’avère moins propice à susciter l’« attachement à [la] personne » de Napoléon.

Il n’est plus temps de congédier les Représentants (Cf. J.-P. Bertaux, idem, p. 122), car ceux-ci ont pris l’initiative : ils ont proclamé la permanence (résolution Lafayette, art. 2), ils entendent communiquer directement, par voie d’affiche, avec les Français, ils se sont ressaisis de la Souveraineté et, pour ainsi dire, du Pouvoir constituant (Sur proposition de Dupin du 15 juin, la Chambre adopte, le 20 juin le principe d’une « commission chargée de coordonner les constitutions avec l’Acte additionnel » (cf. Th. Lentz, Nouvelle histoire du Premier Empire, IV. Les Cent-Jours. 1815, Paris, Fayard, 2010, p. 511), ce qui revient à déclarer la Chambre constituante), en adressant leur décision « aux deux branches de l’autorité représentative » (i.e. la Chambre des Pairs et l’Empereur) (J.-P. Bertaux, id., p. 121). Une commission de Constitution est élue le 28 juin pour réformer la Benjamine ; elle réunit : Bruneau de Beaumetz Delessart, Gineau, Lanjuinais, Lefebvre, Manuel, Poulain-Grandprey, Ramond, Vimar). Les sorts respectifs de la France et de Napoléon se sont séparés sans retour possible.

Le Représentant Jay, s’adressant à Lucien dans le Palais-Bourbon, demande sans détour l’abdication de l’Empereur en agitant la menace de la déchéance (cf. Th. Lentz, idem, p. 514).



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